210e sociétaire
Entrée à la Comédie-Française en 1795 ; sociétaire en 1799 ; retraitée en 1841.
Fille de Jeanne Salvétat, dite Mars, comédienne de province, et de Monvel, auteur-acteur, sociétaire de la Comédie-Française, Anne-Françoise-Hippolyte Boute, dite Mademoiselle Mars, est élevée par Valville, compagnon de sa mère et acteur à Versailles.
Toute petite, elle débute au théâtre Montansier, au Palais-Royal, dans le rôle du petit frère du Désespoir de Jocrisse. Elle entre au théâtre Feydeau, où jouent la plupart des rescapés de la Comédie-Française, au Théâtre Français de la République, en 1798, et est maintenue comme sociétaire dans la troupe réunie en 1799, eu égard à la position de son père.
Celle qui va devenir la jeune première par excellence du premier tiers du XIXe siècle n'est encore qu'une maigre jeune fille aux beaux yeux noirs, un peu guindée, qui joue les ingénues du répertoire. Les leçons de Dugazon et de Mademoiselle Contat, qui la forme à sa succession, lui permettent bientôt, tandis que s'épanouit sa beauté, de s'imposer dans l'emploi des « ingénuités ». Après les Angélique de Molière et Marivaux, la Victorine de Sedaine, Agnès de L’École des femmes et Chérubin du Mariage de Figaro, son emploi évolue.
En 1804, elle est pour la première fois, dans Tartuffe, Elmire qu'elle joue avec une distinction et une pudeur pleines de charme, aux dires de ses contemporains. La retraite de Louise Contat lui ouvre l'emploi des grandes coquettes, dont Célimène qui sera son triomphe. Elle a le mérite, à côté des comédies insignifiantes du temps, de remettre à la mode Molière et Marivaux, exquise Silvia et sensible Araminte. On connaît sa rivalité avec la belle Émilie Leverd, qui brigue les mêmes rôles, et l'obstruction systématique faite à l'avancement de ses rivales (Mesdemoiselles Bourgoin, Mante, Despréaux...).
Son succès lui donne une autorité absolue sur ses camarades. Nombreux sont ses caprices et ses exigences. Elle fait, en 1825, un essai peu réussi dans la tragédie, avec Le Cid d'Andalousie de Lebrun et, malgré son peu de goût personnel pour l'école romantique, mais pour que ne lui échappent pas de « grands » rôles, elle accepte de jouer la duchesse de Guise dans Henri III et sa cour d’Alexandre Dumas, Desdémone dans Le More de Venise d'Alfred de Vigny et Doña Sol dans Hernani de Victor Hugo. On sait, par les Mémoires d'Alexandre Dumas, la patience et la ténacité de Hugo devant les tracasseries continuelles de son interprète. Dans Angelo, tyran de Padoue, elle joue Catarina, face à Marie Dorval la Tisbé ; l'inverse aurait pourtant mieux convenu au tempérament des deux actrices.
Elle refuse de se voir vieillir et, éternelle jeune fille, ose encore créer un rôle de jeune première dans Mademoiselle de Belle-Isle, en 1839, à 60 ans. L'élégance et la finesse de son jeu peuvent encore entretenir l'illusion, mais elle n'échappe tout de même pas aux quolibets d'une partie de la critique. Elle se retire en 1841, après une dernière représentation de Tartuffe et du Jeu de l'amour et du hasard.
Elle meurt en 1847, solitaire, faisant d’Armand, son ancien partenaire, son exécuteur testamentaire.
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